En Chine, les motos doivent être mises à la casse après 13 ans

22 octobre 2024 Assurance Moto

En Chine, une réglementation radicale impose que les motos de plus de 13 ans ou ayant parcouru plus de 120 000 kilomètres soient automatiquement mises à la casse. Cette législation frustrante pour de nombreux amateurs de motos reflète la stratégie chinoise en matière d’industrie motocycliste et de gestion environnementale. Mais pourquoi un tel choix ? Quels sont les impacts de cette politique ?

Une législation stricte aux objectifs multiples

Cette règle impose un double critère pour la destruction des motos en Chine : l’âge et le kilométrage. Si une moto atteint l’une de ces limites – 13 ans ou 120 000 kilomètres –, elle doit être envoyée à la casse, même si son état mécanique est excellent. En outre, les motos qui échouent trois fois au test d’émissions polluantes subissent le même sort, sans aucune exception. Ces dispositions visent deux objectifs principaux : encourager le renouvellement du parc motocycliste et réduire la pollution atmosphérique dans un pays où les normes environnementales deviennent de plus en plus rigoureuses.

En effet, la Chine, confrontée à de graves problèmes de pollution atmosphérique dans ses grandes villes, mise sur un contrôle strict des véhicules à moteur pour limiter les émissions polluantes. Les motos, bien que plus petites que les voitures, sont nombreuses en Chine, et leur remplacement fréquent contribuerait, selon le gouvernement, à améliorer la qualité de l’air.

Stimulation de l’industrie locale

Un autre facteur important derrière cette politique est la volonté de soutenir l’industrie motocycliste chinoise. Le marché local regorge de modèles abordables, souvent vendus à des prix beaucoup plus compétitifs que leurs équivalents européens ou américains. Par exemple, certains modèles neufs en Chine coûtent moins de 4 000 euros, un prix bien inférieur à celui des motos exportées, qui peuvent atteindre jusqu’à 10 000 euros. Cette accessibilité favorise le renouvellement des véhicules tous les dix ans, voire plus fréquemment, et assure un marché dynamique pour les fabricants locaux.

Cette stratégie permet à la Chine de maintenir une demande interne forte, tout en stimulant l’exportation de modèles compétitifs à l’international. Les marques chinoises comme CFMoto, Zontes, ou Voge sont de plus en plus présentes sur les marchés européens et nord-américains, séduisant les consommateurs avec des motos abordables et de qualité.

Un contraste avec les pratiques occidentales

La réglementation chinoise concernant la mise à la casse des motos tranche avec les pratiques d’autres régions du monde, en particulier en Europe. En France, par exemple, les motos anciennes, souvent recherchées par les collectionneurs, jouissent d’une longévité bien plus grande. Les propriétaires investissent dans la réparation et l’entretien pour prolonger la durée de vie de leur véhicule, même au-delà des normes environnementales strictes imposées par l’Union européenne.

Le contrôle technique obligatoire pour les motos en France vise à garantir la sécurité et à réduire les émissions polluantes, mais sans obliger les propriétaires à se séparer de leurs motos une fois un certain seuil atteint. Cela reflète une approche différente de l’écologie et du patrimoine mécanique, où l’accent est davantage mis sur l’entretien et la réutilisation plutôt que sur le remplacement systématique des véhicules.

En outre, la passion pour les motos anciennes en Europe et en Amérique du Nord confère une dimension émotionnelle à la possession d’un deux-roues, un aspect qui semble manquer dans la culture chinoise. Les motos européennes et japonaises des années 1970 et 1980 sont devenues des objets de collection, chéris pour leur histoire et leur esthétique. Cette dimension culturelle s’oppose à la logique de renouvellement rapide et de consommation encouragée par la politique chinoise.

Les limites de la stratégie chinoise

Si cette politique contribue à soutenir l’économie locale et à réduire les émissions polluantes, elle soulève également des critiques, notamment concernant l’obsolescence programmée des véhicules. En imposant une durée de vie fixe aux motos, la Chine crée une forte demande pour des modèles neufs, mais au prix d’un énorme gaspillage de ressources.

Des milliers de motos encore en bon état mécanique sont envoyées à la casse chaque année, même si elles pourraient être réparées ou mises à jour pour répondre aux normes environnementales. Cela soulève des questions sur la durabilité de cette approche, qui, à long terme, pourrait entraîner une surconsommation de matières premières et une augmentation des déchets industriels.

De plus, cette réglementation pourrait nuire à la culture motocycliste en Chine. Contrairement aux amateurs occidentaux qui entretiennent et restaurent leurs véhicules, les motocyclistes chinois sont incités à voir leurs motos comme des biens consommables, à renouveler régulièrement. Cette approche pourrait décourager le développement d’une passion pour les motos, un élément pourtant essentiel pour créer une véritable industrie culturelle autour de ce mode de transport.

Cette loi pourrait-elle s’assouplir ?

Beaucoup comparent l’industrie moto chinoise à celle du Japon dans les années 1970, lorsque des marques comme Honda, Yamaha et Suzuki ont conquis le marché mondial avec des produits fiables, économiques et conçus pour durer. Cependant, la stratégie chinoise semble s’en éloigner progressivement, privilégiant des produits moins chers et un renouvellement fréquent, au détriment de la durabilité. Alors que les constructeurs japonais ont misé sur la longévité et la qualité pour bâtir leur réputation, les fabricants chinois semblent davantage orientés vers des produits plus abordables et moins durables.

Cependant, des collaborations entre des marques chinoises et des géants européens, tels que BMW et KTM, pourraient influencer l’évolution de cette approche. Les échanges technologiques et industriels entre la Chine et l’Occident pourraient inciter les fabricants chinois à produire des motos plus fiables et plus durables, tout en restant compétitifs sur le marché mondial.

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