L’Espagne permet aux deux-roues d’emprunter les bandes d’arrêt d’urgence

10 octobre 2024 Assurance Moto

En 2025, une nouvelle législation en Espagne permettra aux deux-roues motorisés d’emprunter les bandes d’arrêt d’urgence en cas d’embouteillage. Si cette décision prise par la Dirección General de Tráfico (DGT) a pour objectif de fluidifier le trafic, elle soulève des interrogations, notamment en matière de sécurité routière. Quelles sont les implications de cette nouvelle mesure, ses avantages et et ses risques ? Existe-t-il d’autres alternatives ? Nous faisons le point.

Détails et conditions de cette nouvelle mesure

Dès 2025, les motos et scooters en Espagne pourront circuler sur la bande d’arrêt d’urgence lorsque la congestion du trafic devient problématique. Cependant, cette autorisation s’accompagne de conditions strictes. Les véhicules à deux roues ne devront pas dépasser une vitesse de 30 km/h, et devront impérativement céder la priorité aux véhicules d’urgence tels que les ambulances, les forces de l’ordre, les dépanneuses, ainsi qu’aux vélos et véhicules agricoles qui y circulent déjà. Cette mesure est intégrée dans une révision plus large du Code de la Route, qui doit être entérinée par un décret royal.

Ana Blanco, sous-directrice adjointe de la DGT, souligne que cette initiative vise à améliorer la fluidité de la circulation des motards tout en garantissant la sécurité. Toutefois, le projet suscite un débat quant à son efficacité réelle et à la sécurité qu’elle promet. L’état des bandes d’arrêt d’urgence, souvent encombrées de débris ou utilisées par des véhicules en détresse, pose des risques non négligeables.

Une réponse aux besoins des motards espagnols

L’une des raisons de cette décision est la forte demande des motards espagnols eux-mêmes. Depuis plusieurs années, les groupes de défense des motards en Espagne, tels que Mutua Motera, réclament une réglementation plus adaptée à leurs besoins. Pour eux, cette nouvelle mesure permettra de réduire la frustration ressentie lors des embouteillages massifs, fréquents notamment dans les grandes villes comme Madrid ou Barcelone.

D’autre part, l’Espagne est un pays où la passion pour les deux-roues, en particulier la moto, est bien ancrée dans la culture, avec des figures emblématiques comme Marc Márquez ou Jorge Martín en MotoGP. Cette nouvelle réglementation pourrait donc être perçue comme une victoire symbolique pour les motards, leur offrant plus de flexibilité sur la route.

Une pratique relativement risquée

Circuler sur une bande d’arrêt d’urgence est habituellement perçu comme une pratique risquée. Les bandes sont souvent jonchées de débris tels que des morceaux de verre, de métal ou même des résidus d’accidents, augmentant les risques de crevaison et d’accidents. De plus, ces voies sont conçues pour permettre aux véhicules en détresse de s’arrêter en toute sécurité, non pour accueillir des motos ou scooters à faible vitesse. En cas d’urgence, un véhicule pourrait s’y déporter rapidement, sans envisager la présence d’une moto.

Le principal argument contre cette mesure repose sur ces considérations de sécurité. En comparaison, la circulation inter-files, bien que non sans danger, est une pratique mieux contrôlée, surtout lorsqu’elle est correctement encadrée.

La circulation inter-files (CIF) : une alternative plus sûre ?

Plutôt que d’ouvrir la bande d’arrêt d’urgence aux deux-roues, certains experts suggèrent que l’Espagne devrait s’inspirer d’autres pays, comme la France, où la circulation inter-files fait l’objet d’expérimentations encadrées. En France, cette pratique consiste à permettre aux deux-roues de se faufiler entre les files de voitures lorsque le trafic est ralenti, sous certaines conditions. Les motards doivent par exemple limiter leur vitesse à 50 km/h avec un différentiel de vitesse de 30 km/h par rapport aux autres véhicules.

Cette solution a l’avantage de fluidifier la circulation sans exposer les motards aux risques des bandes d’arrêt d’urgence. En effet, la circulation inter-files, si elle est bien réglementée, réduit le nombre d’accidents graves, tout en améliorant l’efficacité du trafic. Des associations comme la Fédération Française des Motards en Colère (FFMC) militent depuis longtemps pour que cette pratique soit reconnue comme une solution viable à long terme.

La question qui se pose est alors la suivante : pourquoi l’Espagne ne prend-elle pas exemple sur la France ? Là où la circulation inter-files est de plus en plus tolérée et encadrée, l’Espagne semble prendre une autre direction, ouvrant une voie plus controversée.

Conclusion : Un modèle à suivre ou un risque à éviter ?

La décision de l’Espagne d’autoriser les deux-roues à emprunter les bandes d’arrêt d’urgence marque une étape significative dans la gestion du trafic urbain. Si l’objectif est de fluidifier la circulation dans un pays où les embouteillages sont fréquents, les risques associés à cette pratique soulèvent des préoccupations légitimes.

Alors que certains y voient une avancée bienvenue pour les motards, d’autres estiment que l’Espagne aurait mieux fait de s’inspirer de la circulation inter-files, jugée plus sûre et déjà en cours d’expérimentation en France. Les prochaines années montreront si cette mesure est véritablement bénéfique, ou si elle engendre plus de risques que de solutions.

Les deux-roues espagnols bénéficieront-ils d’une meilleure circulation en 2025 ? Le débat reste ouvert, mais une chose est sûre : la sécurité devra être au cœur des préoccupations des autorités routières, et les motards devront faire preuve de responsabilité pour que cette mesure soit un succès.

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